« Monsieur Callahan, il faut que vous compreniez que son dossier scolaire est critique. » Dans un geste las, il enleva ses lunettes rondes posées sur son nez, et vrilla ses yeux chocolat dans ceux de son interlocuteur, assis en face de lui. « Elle a obtenu de justesse ses BUSES, je m’inquiète sincèrement. Quelques uns de ses professeurs ont déjà suggéré un redoublement…»

Le directeur de Salem n’était pas d’un tempérament sévère bien au contraire, il avait constamment cette aura de bienveillance qui apaisait quiconque se trouvant à sa portée. Mais, ce jour-là Adam Callahan s’avérait être une exception, la gentillesse de l’enseignant le laissait indifférent. Et pour cause, il avait été convoqué expressément par le vieux sorcier pour parler de sa fille.

« Elle n’est pourtant pas un cas désespéré, vous savez. » reprit le directeur, avec plus de détermination. « Mademoiselle Callahan a cette lueur d’intelligence dans le regard...et sa façon de toujours se dépêtrer des situations les plus rocambolesques est une preuve indéniable qu’elle n’est pas si stupide que ses notes semblent le montrer...ses résultats scolaires restent pourtant une accumulation d’échec ! » finit-il par s’emporter.

Adam secoua légèrement la tête de droite à gauche, affligé. Intérieurement, la déception et l’incompréhension se mélangeaient de façon confuse. Il ne savait que répondre au directeur, Bonnie n’avait jamais été d’un talent quelconque en matière de sorcellerie. C’était un fait établi depuis des années.

« Je ne sais que vous dire, monsieur le directeur. Le monde sorcier l’a toujours écœuré du plus loin que je me souvienne. Elle rejette absolument tout ce qui est de nature magique, elle insiste pour se comporter de la manière la plus moldue qui soit. Pendant les vacances scolaires, elle délaisse complètement sa baguette, et ne fait que côtoyer des sans pouvoirs. Je ne l’ai jamais vu autant à l’aise d’ailleurs. Avec des personnes dénuées de toute magie, Bonnie est tout simplement épanouie. »

« J’avoue n’avoir entendu que des éloges auprès de notre professeur d’étude de moldus, à l’égard de votre fille. » Acquiesça le sorcier. « L’étude des moldus, mais également la-»

« - la métamorphose, oui ! » Coupa le père Callahan, avec un léger sourire malgré la situation. « Elle aime à dire que la métamorphose est indispensable pour son futur. Changer d’apparence et tout ce qui s’en suit...Bonnie prétend que ce cours est un exercice des plus salvateurs. Parce que son plus grand rêve est de devenir actrice, vous voyez. Actrice dans le monde moldu bien sûr... » Il eut un bref rire. « Elle nous harcelait pour que nous l’inscrivions à des cours de théâtre lorsqu’elle était enfant. Bonnie est persuadée d’avoir les moyens pour devenir une future célébrité renommée du cinéma, à tel point qu’au fil des années, ses émotions et ses manies n’ont fait que s’amplifier...Elle vit absolument tout dans la démesure. Autant sa joie que ses déceptions, elle les ressent avec une passion incroyable ! » finit-il dans un rire plus prononcé.

« Je l’avais remarqué. » concéda le directeur, avec malice. Le père de la jeune fille releva la tête, et croisa le regard attentif du vieil homme. Adam inspira difficilement, coupant net sa divagation. Il se rembrunit, lorsqu’il pensa à nouveau à la raison de sa venue dans le somptueux bureau du directeur de la plus grande sorcellerie d’Amérique du Nord.

« Tout cela pour dire que...je ne sais pas. J’ai l’impression que...de...de ne pas connaître ma fille, elle a toujours été plus proche de ses frères. Même de sa mère...oh oui, je pense que toutes les deux se comprenaient parfaitement...» Murmura Adam. L’air perdu, il frotta avec lassitude ses paupières lourdes. Bonnie était la seule de ses enfants avec qui il avait l’impression d’être le pire des pères. Il échouait lamentablement dès qu’on parlait d’elle, un fossé les séparait. Un fossé qui le tuait à petit feu.
Bonnie n’était pas aussi violente que sa demi-sœur Maïa, ni aussi calme que Lewis ou aussi étrange que Cohnaan. La jeune fille semblait être, disons, le juste milieu. Elle aurait du par conséquent, être la plus facile à comprendre de toute la fratrie, ne serait-ce qu’à sa manière de dire tout haut ce que les autres pensaient tout bas, ou à la vue de son visage si expressif qui reflétait à chaque fois la moindre de ses émotions.

« Vous pensez donc que si elle ne cherche pas foncièrement à se faire exclure de l'école, c’est exclusivement pour la métamorphose, et pour aborder une vision différente des non-sorciers par le biais du cours d’étude de moldus ? » Proposa le directeur, d’un ton doux et compréhensif.

« Je ne sais pas…je ne sais plus monsieur. » répéta Adam une énième fois. « Sa...sa mère tenait tout particulièrement à ce que nos enfants étudient à l’institut de Salem...je suppose que c’est aussi l’une des raisons qui retient encore Bonnie ici. Une promesse qu’elle lui a faite sans doute...»

« J’entends tout ce que vous dites, je vous signale ! » La voix agacée de la jeune fille se répercuta violemment dans la pièce, faisant sursauter les deux adultes. Adam se redressa sur sa chaise, et jeta un rapide coup d’œil dans le bureau du directeur. En vain, ils étaient seuls. « Bon sang ! En quoi ont été construits vos murs ? Du chewing-gum ? Du carton recyclable ? Parce que niveau isolation, ça laisse à désirer, M’sieur ! »

Oh, Bonnie. Tu as toujours le don de briser les moments dramatiques dont tu n’es pas l’actrice principale, n’est-ce pas ?

Décontenancé, Adam s’empourpra en seulement quelques secondes. Il s’exclama un « Bonnie ! », tentant de réprimander le manque de politesse dont elle venait de faire preuve.
« Mademoiselle Callahan, veuillez entrer je vous prie. » Intervint la voix aimable du directeur.

La porte s’entrouvrit alors légèrement, et une bouille encadrée par de jolies boucles brunes apparut. Bonnie arborait une expression étonnement beaucoup moins assurée que ce que sa voix avait laissé croire, quelques secondes plutôt. Elle salua timidement son directeur, et lui obéit docilement lorsqu’il lui fit signe de s’asseoir aux côtés de son père.

« Je suis désolé pour cette maladresse, j’ai tendance à oublier que mon bureau a besoin de rénovations. » Plaisanta le vieux sorcier.

« C’est sûr que ce ne serait pas du luxe. » répondit la jeune fille. Prenant conscience de ce qu’elle venait de dire, ses yeux s’agrandirent de façon si comique, qu’elle en ressemblait presque à un cartoon américain. « Je ne voulais pas dire ça péjorativement ! Je l’entendais dans le sens de la conversation je- » S’exclama Bonnie, essayant tant bien que mal de se corriger. « Désolée je parle trop. Je parle toujours trop ce n’est pas de ma faute je ne m’en rends souvent pas compte et- » Elle se coupa dans son élan, reprenant son souffle. Bonnie parlait souvent sans s’arrêter une seule seconde. « ...Enfin, voilà. Hum. »

L’américaine jeta un bref coup d’œil à son père, qui semblait plus que blasé par le comportement de sa fille. Elle se mordit la lèvre inférieure, se promettant de ne plus intervenir si on ne la sollicitait pas directement. Un défi des plus ardus pour une fille comme Bonnie. Elle se mit alors à penser aux prochaines vacances qui s'annonçaient. Elle se mit à rêvasser un instant, du sable fin et de la baie magnifique de San Francisco. Des journées ensoleillées qu'elle passerait avec Maïa à se bronzer sur la plage, ou aux châteaux de sable qu'elle construirait avec Lily, ainsi qu'aux match de volley-ball qu'elles feraient avec Cohnaan et Lewis.

« Parlons cours, mademoiselle Callahan. » Elle acquiesça vaguement, croisant et décroisant ses mains sur ses jambes. Le directeur plissa imperceptiblement les yeux, avant de détourner son regard vers l'incroyable tas de parchemins sur son bureau. « Bien, bien, bien....parlons Histoire de la magie ? »

« Oh, pas ça je vous en prie ! » Grimaça la sorcière. « La révolte des Gobelins ? On se croirait dans un mauvais Walt Disney ! La chute d'un sorcier appelé Voldemort ? C'est un nom à dormir debout ça, même les sept nains en avaient des meilleurs ! Comment voulez-vous que je m'intéresse à un cours pareil ? Bon d'accord, je suis réputée pour être assez enfantine la plupart du temps, mais là, il ne faut pas exagérer. Je ne peux pas apprendre des trucs comme ça ! » S'exclama-t-elle avec fougue.

Quelques secondes passèrent dans le silence le plus total, le directeur réajustant ses lunettes rondes sur son nez, l'air passablement surpris. Il se reprit néanmoins très vite, et se racla la gorge. « Ma foi, c'est un point de vue assez original. » Il parcourut à nouveau son parchemin de haut en bas, avant de proposer une autre matière. « La botanique ? »

Depuis quelques années à présent, le directeur avait appris à connaître plus ou moins le tempérament de Bonnie. Mais jamais, ô grand jamais, il ne se serait attendu à la réaction à laquelle il assistait. Une ombre était passée dans le regard émeraude de l'enfant, ses mains se crispant si fortement à sa jupe que les jointures de ses doigts blanchissaient à vue d'œil. Mais ce qui le marqua le plus fut son silence. Il ne l'avait jamais vu à court de mots. Jamais.

« Bonnie ne supporte pas tout ce qui se rapproche de près ou de loin au soin des plantes. » Le père, se rendit compte le directeur, ne se portait pas mieux que sa fille. Lui aussi semblait plus froid, plus distant. « Une sorte de phobie, si vous voulez. »

Ce que le vieux sorcier ne savait pas, c'était que les plantes ne perturbaient aucunement la jeune fille, bien au contraire, elle adorait sentir diverses fleurs de jardins en tout genre. Ce qui la hantait réellement, était le fait que sa mère avait quitté le domicile familial pour un simple jardinier. A priori, cela était ridicule. Mais Bonnie n'avait jamais pu véritablement assimiler le départ brusque de sa mère avec son amant. Un changement trop bouleversant pour une gamine, et qui avait engendré une vie bien compliquée pour de simples enfants. Vivre une fois sur deux avec son père, et vice versa. Assurément, sans la présence de sa fratrie tant adorée, la jeune femme n'aurait jamais pu supporter cette situation.

« Avec tout le respect que je vous dois monsieur, peut-être serait-il préférable de reporter ce rendez-vous à un autre jour ? »

Le directeur consentit à sa demande plus facilement qu'Adam ne l'aurait cru, et sans plus de cérémonie, les deux membres de la famille Callahan sortirent du bureau après avoir salué poliment le vieil homme. Dans les couloirs de l'Institut de Salem, le père ne put cependant s'empêcher de parler à nouveau, du sujet dont le directeur avait vainement tenté d'aborder avec elle.

« Ce n'est pourtant pas si difficile que d'accorder un peu plus d'attention aux cours, Bonnie. Ça nous éviterait aisément des convocations de ce genre à l'avenir. »
« Tu ne comprends vraiment rien, papa. »
« Alors éclaire-moi Bonnie. Dis-moi... » Il soupira. « Pourquoi cette haine envers les sorciers ? »

Que pouvait-elle dire ? Qu’étant enfant, scolarisée chez les moldus, elle s’était toujours sentie à part parmi tous ces microbes dénués de pouvoirs magiques ? Que ce sentiment de solitude qu’elle avait du porter durant toutes ses années de maternelle et de primaire ainsi que sa situation familiale des plus complexes, l’avaient rendu encore plus envieuse de ces êtres si insouciants ? Elle avait toujours voulu s’intégrer parfaitement. Or, à l’époque, être sorcière s’était avéré être une tare des plus difficiles à supporter pour une gamine de moins de onze ans. Devoir cacher sa véritable nature à son amoureux de CM2, quel enfer. Mais surtout, dans un tout autre registre, qu’en était-il de sa mère ? Si la sorcellerie était si puissante, pourquoi n’avait-elle pas réussi à sauver maman de son accident mortel ? Tous ces désirs inassouvis et ces questions sans réponse avaient lentement transformé sa passion pour le monde moldu en aversion des plus radicales à l’encontre de la magie. Bonnie ne voulait plus rien avoir à faire avec ces sorciers. Dieu merci, il ne lui restait plus qu’une année à Salem avant de plier bagage et de partir vivre définitivement dans le monde moldu.

« Il n’y a rien à dire. Je n’aime pas, c’est tout. » Affirma-t-elle, avec un haussement d’épaules.

« Je n’arrive pas à croire que nous soyons chez les rosbifs. » Ronchonna la brunette Callahan. « Je ne veux pas être chez les rosbifs. Des rosbifs avec des baguettes magiques, qui plus est. » Même lorsqu’elle se sentait l’âme boudeuse, Bonnie ne pouvait s’empêcher de parler. Elle était bavarde. Trop bavarde. « Tais-toi ! » chuchota un Salemien de sixième année, à ses côtés. La jeune fille grimaça, mordant douloureusement sa langue afin d’éviter de laisser échapper un flot de paroles. Tous les nouveaux arrivants des États-Unis attendaient impatiemment dans le Hall d’entrée de Poudlard, face aux portes encore fermées de la Grande Salle. Ils parvenaient à entendre le discours pompeux du directeur anglais, ainsi que les murmures des étudiants, Beauxbâtons et Durmstrang ayant déjà été présentés à la populace britannique. « Et en plus, il y a les fromages qui puent. » Grogna à nouveau Callahan. Finalement, le seul avantage à se retrouver en Grande Bretagne était l'absence de tremblements de terre si fréquents à San Francisco, quoique Salem connaissait également cette stabilité. « Ferme là ! » Répéta le sixième année, ses yeux émerveillés fixés avidement sur les portes closes. « Oh c’est booon ! Qu’est-ce que tu crois ? Qu’ils vont nous accueillirent à bras ouverts et la bouche en cœur ? » L’amoureuse des moldus eut une moue moqueuse. « Tu crois qu’ils vont dire quoi exactement ? ‘Ohhh des McDonaldiens, géniaaaaal !» Imita-t-elle parfaitement, dans un accent anglais et faussement excitée. « On a une réputation de bouffeurs de burgers, d’obèses et j’en passe. Sans oublier qu’on viole leur terrain, mec. Je ne donne pas chair de notre peau. Ça va être la guerre. Et comptez pas sur moi pour participer ! » Le sixième année l’observa quelques secondes avant de reporter son attention sur les portes, ce qui ne fit qu’agacer davantage Bonnie. « Tu te trompes.» Déclara-t-il, d’un ton sans équivoque. « C’est ce qu’on verra ! » S’exclama la jeune fille exaspérée, en levant les bras en l’air. Qu'elle avait hâte de retrouver sa fratrie, eux n'auraient certainement pas un comportement aussi naïf que celui du sixième année...n'est-ce pas ?

Fiche terminée.

Je vous aime aussi.
& merci ma Lily, ça me fait trop plaisir. *_____*

Désolée de ne pas avoir parlé davantage de notre fratrie dans ma fiche. Je suis si douée pour imiter les personnages des autres, que j'aurais sans doute massacré vos merveilleux persos.

Merci beaucoup, c'est gentil
JE VEUX DES LIENS AVEC VOUS.

Gala ; ouep, j'ai fait exprès. Je cherchais une idée pour ne pas trop opposer Lewis et Bonnie, faire en sorte qu'ils se ressemblent d'une certaine manière tout en étant différents. Contente que ça te plaise. *o*