(c) Lillia

« Chaque fois qu'un enfant dit : "Je ne crois pas aux fées", il y a quelque part une petite fée qui meurt. »
_ Peter Pan

Un joli sourire. Ce sourire qui ferait fondre n'importe quel parent. Qui faisait fondre sa mère, chaque fois que, le soir, la fillette désirait une autre histoire. Elle ne savait pas dire non, elle n'était jamais parvenue à refuser quoi que ce soit à ses enfants, de toutes façons. « Bien, mais juste une alors. » Et elle avait toujours une question pour repousser l'instant où, fatalement, il faudrait plonger au pays des rêves, loin, si loin de sa mère, de sa soeur, comme elle le pensait. « Maman ? Tu crois que les fées existent ? » demanda l'une des petites, tandis que l'autre lui rétorquait, du tac au tac : « Pourquoi elles n'existeraient pas ? On est bien des sorcières. » Les lèvres de la femme, assise entre les deux lits, se sont étirées en un sourire étrangement proche de celui des deux gamines, sourire irrésistible qui ferait fondre les hommes, plus tard. « Tout existe, il suffit d'y croire très fort. » Un homme, aux yeux d'un gris métallique, s'est appuyé dans l'encadrement de la porte, et son regard froid s'est posé tour à tour sur chaque fille présente dans la pièce, avant que sa voix ne rompe la conversation en cours. « Ne leur entre pas de telles idioties en tête, Avyva. » L'interpellée a relevé son regard azur vers lui, un regard mélancolique, sans rien répondre, toutefois. « Temperhence, Prudhence, il est temps de dormir. » Dans un geste synchrone, elles se sont mordues la lèvre inférieure, s'installant dans les draps, sans un mot. Avyva a rangé le livre, et avant de leur souhaiter une bonne nuit, a déposé un baiser sur le front de chacune de ses perles.

(c) Lillia
« Lorsque le premier bébé rit pour la première fois, son rire se brisa en un million de morceaux, et ils sautèrent un peu partout. Ce fut l'origine des fées. »
_ Peter Pan

Les larmes, les larmes, toujours les larmes. Prudhence était incapable de se souvenir de la première fois où elle avait pleuré, cependant elle se souvenait toujours d'une façon cuisante l'effet que cela faisait. Voir sa mère en position de faiblesse, c'était un peu comme se retrouver à sa place, à subir les coups d'un homme ivre, d'un homme qui sentait la vodka a des kilomètres à la ronde. Avyva préférait le champagne et n'en abusait jamais, et ce n'était que la plus petite différence que l'on pouvait observer entre les deux époux. Le sang-pur.. les jumelles ne comprenaient pas ce que cela avait d'important, que de conserver la pureté d'un sang qui restait pourpre qu'importe la personne, son milieu ou ses origines. Elles ne le comprenaient pas, d'autant plus que cette idée détruisait sa famille depuis des générations, si bien que mis à part leur petit cocon en péril, il ne restait plus beaucoup de Wylvern.. en dehors des asiles. Accroupies discrètement en haut des escaliers entre le rez-de-chaussée et le premier étage où se situait leur chambre, elles observaient la dispute qui venait d'éclater entre l'épouse inquiète et le mari despotique. « T'as pas été foutue d'me faire un fils, alors tu la ferme et tu vas te coucher, sale ingrate ! » La gifle est partie, vive. La force du choc sur sa joue a fait reculé la femme si frêle, si pâle. « Tu.. Tu vas réveiller les filles.. » La baguette s'est retrouvée sous son menton alors que les mots venaient à peine de franchir ses lèvres. « Tu sais, ma douce, ma très douce.. je pourrais te tuer sur le champ. Tu ne m'as jamais été utile, cependant j'attendrai que les filles soient en âge de se marier, pour enfin avoir la paix, et le prestige d'un nom auquel tu fais honte. » Les gamines ont échangé un regard angoissé. Temperhence a attrapé sa soeur par le poignet pour l'entraîner dans la chambre, loin de ces horreurs qui, elle le savait, pourrait bien se réaliser un jour.. un jour plus proche qu'aucun d'eux ne l'imaginait.

(c) Lillia
« Il n'existe que des contes de fées sanglants. Tout conte de fées est issu des profondeurs du sang et de la peur. »
_ Franz Kafka

«  Un autre ? T'en veux un autre ? Alors fais apparaître ce patronus, tout de suite ! » Il a pointé l'objet en bois en direction de sa fille, froid, fier, imperturbable. Temperhence tremblait légèrement, incapable de se focaliser sur un souvenir heureux. Prudhence, consciente qu'elle serait la suivante, se demandait si elles avaient vraiment, dans leur enfance, un seul souvenir heureux. « Je.. Je.. arrive pas.. » Il l'a poussé, violemment, avant d'attraper sa seconde fille par le poignet, lui ordonnant de prononcer la formule, de montrer l'exemple. Ce sont les contes de fées, les moments passés avec sa mère, qui lui permirent de former le patronus tant désiré. Le papillon lumineux s'est envolé dans la pièce, sous le regard fasciné de Temperhence, sous les yeux émerveillés de Prue, dans le rire moqueur d'un père sans cesse insatisfait. Il s'est calmé brusquement, avant de porter son attention sur la gamine, à l'écart, et sans pitié, a reprit la parole. « A toi. Tout de suite. » Elle a déglutit, difficilement, mais avant qu'elle ne lève sa baguette, un éclair a traversé le salon, propulsant le despote contre le miroir ornant l'entrée. Les filles se sont précipitées à l'étage, conscientes que cette fois-ci, leur mère était allée bien trop loin.. assez pour que le manoir n'en ressorte pas entier.

Salem. L'école de magie. Pour Prudhence et Temperhence, ce fut la libération. Elles étaient enfin loin de leur tyran de père, loin des disputes, des sortilèges impardonnables et des dangers multiples qu'impliquait le fait d'être sorcières dans une famille déchirée par la haine et les principes archaïques. Elles pouvaient s'épanouir, trouver la personnalité correspondant à ce qu'au fond, elles étaient. Il n'y avait plus cette nécessité absolue d'être irréprochables, il n'y avait plus le regard désapprobateur d'un homme froid, dont le coeur imbibé d'alcool ne distinguait plus le bien du mal. A les voir comme ça, dans les couloirs, personne n'aurait parié sur les différences qui se creusaient entre les jumelles, si physiquement identiques, si proches, inséparables. Et pourtant.. pourtant leurs intérêts finirent par faire d'elles des miroirs inversés. Alors que Temperhence était l'image même de la sagesse, de la perfection, de la vertu, Prudhence jouait à des jeux dangereux, sans être capable d'expliquer ce qui la poussait à agir ainsi. Ainsi, plus les années passèrent, plus le retour au Manoir Wylvern se faisait difficile, violent, douloureux. Avyva continuait à protéger ses filles envers et contre tous, stupéfixiant son époux lorsqu'il allait trop loin, s'accusant des maladresses de Temperhence, prenant les coups destinés à Prudhence.. L'une s'en rendait malade, l'autre jouait l'ignorance.

(c) Lillia
« Mais d'où tiens-tu que les malheurs prévus sont plus supportables que les autres ? »
_ Daniel Pennac

Sa peau était un délice. Son corps pressé contre le sien avait un goût de liberté. Dans ses bras, Prudhence se sentait unique, oubliant un instant qu'elle était comme ces oiseaux incapables de vivre loin de leur moitié, oubliant qu'elle était une sorte d'inséparable, ne pouvant survivre loin de l'autorité et de la perfection de sa soeur. Les caresses sages sur sa taille la faisaient frissonner, les lèvres joueuses dans son cou étaient une promesse d'avenir meilleur. Nathanaël n'était pas un sang-pur, ni un homme fréquentable, et s'il avait un prénom proche des anges, il restait foncièrement plus attaché aux démons, Asmodée pouvant bien être la plus influente dans son cas. En s'accrochant à sa ceinture, Prue était consciente qu'elle avait franchit la limite, qu'elle avait tourné la clef de la boîte de Pandore, boîte qui ne tarderait pas à s'ouvrir, à l'instar des boutons de la chemise du jeune homme. Ses cheveux châtains glissaient sous ses doigts alors que ses prunelles d'un bleu océanique se perdait dans les courbes parfaites de la jeune femme tandis qu'il retirait les vêtements dans un empressement non dissimulait. Il la voulait, et ce qu'il voulait, il l'obtenait toujours. Elle, elle s'était laissée emporter par les papillons investissant son bas-ventre. Elle a cessé de réfléchir, cessé de penser, effaçant pour la première fois la souffrance d'une vie décousue pour la remplacer par un sentiment de bien-être intense, même si éphémère.

Ephémère comme la paix. Lorsqu'elle a ouvert les yeux, toujours dans les bras du garçon, ce sont les hurlements provenant du salon qu'elle entendit en premier. Il dormait. Ce n'est qu'en la sentant remuer contre sa peau qu'il a émergé de son sommeil profond. « Un problème, ma douce ? » a-t-il murmuré près de son oreille, dans un souffle qui lui donna des frissons, réminiscence d'un plaisir passé. Elle n'a pas daigné répondre, se levant pour enfiler rapidement les premiers vêtements qui lui passèrent sous la mains, victime d'un pressentiment tout ce qu'il y avait de plus mauvais. Il a fait de même, réalisant le vacarme qui s'échappait de la pièce, juste au dessous de la chambre de sa belle conquête. Descendre n'était peut-être pas prudent, mais un prénom ne dicte pas toute une vie, de toutes façons. En tournant dans le couloir, elle s'est retrouvée face à sa copie conforme, visiblement occupée à observer la scène, du haut des escaliers. « Franchement Prue, bravo ! » L'interpellée a froncé les sourcils, dans l'incompréhension, alors que Nathanaël se tenait derrière elle, calme. « Ramener un homme, ici ! Tu veux notre mort ? Tu sais pourtant que père nous veut aussi pures que des colombes ! Il a souillé tes lèvres, j'espère que tu en as conscience ! » Elle a croisé les bras, supérieure, et dans un sourire en coin s'est contentée de répondre : « Pas que les lèvres, d'ailleurs.. » Déjà lassé de l'ambiance, le responsable des discordes a décidé de quitter la bâtisse, passant tranquillement entre la mère et le père, qui se toisaient, baguette en main. Tout est allé très vite, Temperhence et Prudhence ayant juste le temps de se mêler au conflit, tentant d'épargner la vie d'un innocent qui ne l'était pas tant. L'éclair vert a frappé la jeune blonde, propulsée contre la cheminée éteinte.. le choc provoqua un bruit sourd, mais chacun savait qu'elle était morte avant de heurter la surface de marbre. La colère s'est répandue comme un poison dans les veines d'Avyva qui a riposté avec un Doloris, cependant Sylvan n'était pas stupide, préférant se protéger en prenant le corps de sa fille comme bouclier plutôt que d'y laisser sa peau.. Non, il ne trépasserait pas à cause de son indigne de femme. Le hurlement a déchiré le bruit ambiant, la douleur brûlante envahissant le corps frêle de l'adolescente, et l'atroce impression que sa peau se fendait la fit plier jusqu'à la mettre à terre.

La lâcheté fait partie intégrante des hommes, Nathanaël ne fit pas d'entorse à cette vérité, et face à la folie qui régnait, il prit la fuite, ni plus ni moins. Lorsque la torture fut interrompue, un second éclair vert s'est envolé dans les airs, frappant Avyva de plein fouet, sous le regard embué de larmes d'une fille qui ne comprenait plus rien à ce qu'il se passait. Les images, les souvenirs, tout s'est emmêlé alors qu'elle sombrait dans un abîme profond, dans un noir dont elle ne voulait ressortir sous aucun prétexte.

(c) Lillia
« La mémoire, c'est l'imagination à l'envers. »
_ Daniel Pennac

« Mademoiselle Gray-Wylvern ? Vous m'entendez ? » Ses paupières ont papillonné un instant, la lumière agressive de la pièce l'empêchant de distinguer correctement les formes. Les sons étaient brouillés, son corps courbaturé, et surtout, elle ne parvenait pas à se souvenir de ce qu'elle faisait ici. « Mademoiselle ? » Elle a entr'ouvert les lèvres, mais aucun son ne s'est fait entendre. Dans le couloir, un homme discutait avec un auror, elle a vaguement reconnu la silhouette, ou du moins elle a été capable de comprendre qu'il était là à cause d'elle, sans pouvoir mettre un nom sur ce visage. « Si vous comprenez ce que je dis, clignez des yeux, s'il vous plaît. » L'adolescente a reporté son regard sur l'infirmière, lui signifiant qu'elle comprenait. Les questions se sont enchaînées de cette façon, la jeune femme ne voulant pas brusquer cette étrange victime qui, au premier abord, avait certainement été victime d'un sortilège d'amnésie. Les deux hommes qu'elle avait remarqué précédemment sont rentrés, l'auror exigeant de parler à Prudhence, bien que la concernée ne se sente pas concernée par ce prénom.. il ne lui évoquait rien. « Mademoiselle, je suis là pour enquêter sur votre accident.. vous souvenez-vous de quelque chose ? » Elle a fait non de la tête, après une réflexion intense qui ne la mena qu'à une personne : Temperhence. « Ma.. ma soeur.. elle.. » Rien ne trouvait d'ordre logique dans ses idées, elle ne parvenait pas à agencer les images, si rares soient elles, qui envahissaient son champ de vision. Ne t'inquiète pas, je suis là, Mel'. Elle a tourné la tête vers ce qui semblait être le vide, pourtant sous ses yeux est apparue son portrait craché, seul lien avec un passé étrangement absent. « Monsieur Wylvern.. Vous étiez en rendez-vous d'affaire, quand vous êtes rentré chez vous, rien n'a semblé étrange ? » Il a rit, amer, feignant la douleur et les nerfs à fleur de peau. « C'est vrai qu'il est tout à fait normal de trouver deux cadavres et une inconsciente sur le sol de son salon, Monsieur ! » La lumière n'a jamais été faite sur ces crimes, la survivante dans l'impossibilité de retracer les faits, le coupable se faisant passer pour un saint en adoration devant sa fille, dernière représentante de sa lignée.. Un beau mensonge, vous dirait Temperhence, si seulement elle n'était pas qu'une manifestation de l'inconscient perturbé de Prudhence.

(c) Lillia
« Les fées nous endorment, nous ouvrent les portes de leur royaume, qui se referment sur nous sans qu'elles aient pris la précaution de nous en remettre la clé. »
_ Jean Tétreau

Hey, regarde ! Cest magnifique ! Je marchais dans le hall de l'école de magie, totalement perdue. Salem me semblait terriblement loin, pourtant la mélancolie ne se faisait pas ressentir. Temperhence me faisait penser à une pile électrique, et je me demandais comment elle n'attirait pas l'attention sur nous.. après tout, depuis l'accident dont je ne parvenais toujours pas à me souvenir, j'avais remarqué que personne ne lui parlait, comme si elle était invisible, ou trop peu digne d'intérêt. Nous avions été envoyé à Poudlard après la fermeture de notre école, pour moi c'était bien plus qu'une rentrée, c'était une découverte, j'entrais en sixième année dans un univers inconnu, avec une mémoire altérée et la sensation de ne pas être à ma place. J'avais en tête toutes mes connaissances magiques, j'étais en possession de toutes mes facultés, pourtant je n'éprouvais pas le besoin de parler, de m'approcher des autres.. que pourrais-je bien leur dire ? Rien. Je venais d'un autre pays, je n'étais pas banale, mais je ne pouvais raconter ma vie là-bas, car elle était recouverte d'un voile noir auquel je ne me faisais pas. Melusyne.. Tu le trouves pas mignon, celui-là ? Je lui ai murmuré de la fermer, ne désirant pas attiser les curiosités, et je me suis dirigée vers la grande salle, à l'instar de tous les élèves alentours. Le décor m'a fasciné un long moment, le plafond magique me donnant déjà des idées d'évasion, les tables pleines de plats divers et variés laissant flotter des odeurs délicieuses.. mais mon estomac ne semblait pas décidé à accepter quoi que ce soit.

M'asseyant à une place vide, j'ai écouté les conversations, observé les liens se nouer, mais je suis restée silencieuse. Je ne me sentais pas d'approcher la vie en communauté, pas encore. J'avais ma soeur, c'était tout ce qui comptait. Mes prunelles se sont heurtées plusieurs fois à d'autres, de même couleur.. un jeune homme installé à une autre table, mais j'ai bien vite fait semblant d'ignorer ce fait. Je ne suis cependant pas parvenue à repousser les images qui ont perturbé mon champ de vision. Des flashes. Des morceaux de vie qui s'insinuaient entre mon inconscient et ma conscience, qui remontaient à la surface. Je ne comprenais pas pourquoi, ni comment, mais cela arrivait. Parfois, je tentais de remettre les éléments en ordre, mais rien ne collait jamais. J'avais souvent l'impression de tourner en rond, sans pouvoir en parler. L'infirmière de Ste Mangouste, que je voyais à chaque début de vacances, et celle de l'école, me conseillaient d'écrire tout ce qui me revenait.. elles disaient que cela m'aiderait. J'avais du mal à croire qu'après six mois, quelque chose de concret finirait pas me revenir.

Et si l'ancienne et la nouvelle moi ne faisaient qu'alterner sans jamais renouer ?

Le surnom + une salémienne + Natalia.
Bienvenue & bon courage pour la suite de ta fiche.

BIENVENUUUUUE

Quel personnage intéressant !
Validée à Salem, donc. Géo viendra t'ajouter au groupe.

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